IN DATA WE TRUST, nouveau paradigme

IN DATA WE TRUST, nouveau paradigme

Dans Débuts du cinéma-spectacle, matrice des médias de masse, nous avons creusé la matière du film pour analyser son dire. Dicton à retenir en guise de conclusion de ce premier tir : « Dans la savane, si les lions sont rois, les zèbres font signe ».

Et la télévision dans tout ça ? Comme annoncé sur le fil nous creuserons ici son cadre pour explorer sa mire et mettre en lumière cette citation : «  faim de télévision, fin de civilisation.» avant de poursuivre notre enquête sur la fabrique de l’information pour toucher son fond. Nous insisterons surtout pour démontrer comment la télévision alliée aux nouvelles technologies de l’information, a transformé son public en plancton pour gros poissons.

Regard blanc projeté sur la matrice. Surface lisse. Une seule action pour faire couler le fluide. Du tube cathodique à l’écran plasma, la télé est semblable à un jet de lumières et de sons tout droit sortis d’un cadre vide et noir qui bave sans cesse son écume insipide, en grille. En lignes pour le cube, en pixels pour le screen. En programmes ciblés quelque soit l’émetteur qui crache sa mise pour un torpillage des mirettes et des esgourdes en escadrille.

A l’inverse du cinéma qui envoie un signal qui contient moitié de noir et rebondit sur toile avant d’être capté par le regard, face au cube cathodique ou à l’écran plat, la rétine et le tympan sont bombardés directement sans interruption par les points-lignes en plans et les ondes sonores qu’émet constamment le poste dans le champ. GANG BANG. La pornographie a tout à voir avec la télévision. Plein cadre sur l’action. Monstration. Enormité. Disproportion. Devant la télévision œil et oreille font récepteur sans discontinuité d’une monstruosité qui ne dit pas son nom.

Consternation. Le voyeur reçoit ET renvoie images et sons dans l’instant, traversé par un flux continu, ininterrompu. Le flux que je reçois sans sommation, je le renvoie instantanément pris par les émotions. Je réfléchis l’image sans réflexion. Captation des sens. Captivation de l’attention. Le dispositif télévision appelle une mise en captivité pour son émission-réception. « Mon métier c’est de vendre du temps de cerveau disponible » dixit Le Lay, en poste à TF1 face à des etudiants en Marketing-communication, entendez par là manipulation de l’opinion et des médias, venus en consultation.

Décapitation. La seule façon d’échapper au flot de l’écran télé et sa diction, c’est d’entrer en oubli ou en disjonction. Le zapping comme réponse pour garder la main sur la partition ? Ou la coupure du poste de télévision ?

Autre travers notoire du poste qui enchaîne le spectateur à la scène ? Le cinéma appelait un bain séance tenante pour faire fusion. Opéra en mode majeur en communion dans le noir de la salle. Le cinéma réunissait les foules. Il avait même son Paradis et ses enfants sans la salle, suffisamment perchés pour dominer le spectacle, ruer et huer, muter en Pégase et rejoindre les étoiles.

A l’inverse, retranché seul devant l’écran, le téléspectateur subit chaque soir le bombardement d’une boite noire dans sa cage à lumières et un reset de sa mémoire dans le murmure de sa vie emmurée entre quatre murs. Composition en mode mineur. En télévision, le bain est celui de solitudes traversées par les mille et mille rebonds que recrachent les émissions pour faire concurrence au soleil, de jour comme de nuit, dans des réduits emplis de misère. La télévision fabrique de l’isolement et du vide en boite, à répétition. La raison pour laquelle la jeunesse qui la fuit, recrée en base de liens, une structure sociale calquée sur le mode tribal ou communautaire ? Mutation des modes d’échange et de communion pour échapper aux filets tendus par les pros de la communication.


Rebonds de boucles en boucle. Bombardement de photons en plans sur planctons en plan. PAN PAN ! La redite fait la télévision. Jusqu’à épuisement des sens et du fond, pour rendre molle et malléable l’attention. “Le cinéma fabrique des souvenirs, la télévision de l’oubli”, disait Godard. « La vidéo c’est de l’eau », disait Bill viola. La télévision transformerait-elle ses affidés et aficionados en ectoplasmes pour mieux les manger sur place ? Pas étonnant qu’elle ait évolué du tube cathodique à l’écran plasma dans le salon. De bocal elle est passé à aquarium géant pour regarder passer des poissons. Le spectateur est devenu plancton. Absorption ou rejet total à prévoir en réaction ? Implosion ou explosion de la matrice en fonction ? Ecran Noir devant très sûrement. Comme au commencement.

Ce noir est déjà là au demeurant. Et il a engendré un nouveau BIG BANG. La multiplication des chaînes s’est répandue d’un coup après ouverture des ondes, éparpillant les émetteurs dans l’hyper-espace d’internet à coups de centaines de milliards d’investissement par les gros pontes des médias et de la communication. La télévision a été supplantée par les Nouvelles Technologies mais n’a pas coulé. Elle s’est fondue dans le moule avec le cinéma qu’elle avait prise dans ses filets, et irrigue les canaux désormais de sa coulée H24. Que voit-on resurgir au premier rang pour synthèse en ligne de ces mutations ? Des Netflix, des Amazones et autres géants de jungle armés, des opérateurs de téléphonie alliés avec des compagnies télés et autres créatures hybrides qui mettent le cinéma et les news les plus saillantes en avant, posés comme des petites galettes à ramasser. Hansel et Gretel toujours d’actualité. la télévision, une sacrée cuisine, ou règne en maitre le narratif ou story-telling. ! Tous les médias sans exception, y compris ce site, sont des scènes de théâtre. Nous aborderons plus amplement cette aspect dans la deuxième partie de cette démonstration à charge.

Changement de paradigme. Le cinéma projetait, la télévision bombardait, Internet tisse. Mais le vide créé subsiste. Fil à suivre avec l’araignée comme piste ? Spiderman, vous connaissez ? Un autre succès du box office ET de la télé. Un signe antique pour dire que ce curieux animal ne faisait qu’attendre, tapi dans le noir pour surgir et rafler la mise ? Gare au gorille ! Car cette créature fort instructrice a aussi sa face cachée annoncée au cinéma pour nous dire… Attention vous pouvez tout autant finir emmailloté et sucé de toute votre moelle, que étoilé(e). Le monde cybernétique prend aujourd’hui l’homme et sa la liberté dans ses fils et pointe son dard pour l’effrayer et l’assoupir. L’inconscience des captifs emmaillotés dans ses fils est sa tache son objectif, pour en aspirer la moelle et pantomimer les vies.

La manipulation, voir l’exemple décrit dans l’article qui complète celui ci, Manipulation Master, a connu bien des évolutions depuis jusqu’à passer au stade de l’auto-conditionnement et l’auto-suggestionnement des captés. Le numérique a démultiplié les possibilités de manipuler les hommes. On est passé de l’exploitation de l’homme par l’homme au conditionnement de l’homme par l’homme. L’évolution des savoirs et des technologies permet désormais de mettre en œuvre le “paradigme ultime” de la communication-marketing : le « ONE to ONE », la possibilité de créer une adresse individualisée à partir de toutes les informations collectées sur chaque un avec les appareils électroniques connectés. Jadis, il fallait 1000 tracts dans les boites aux lettres pour toucher un captif et faire une vente hasardeuse, et dépenser des millions d’euros en spot TV pour toucher des millions de spectateurs cloués devant le poste. Sans jamais identifier aucun d’entre eux. Aujourd’hui, l’internet et l’iA permettent de cibler individuellement chacun, au moment opportun de surcroît, jusque dans ses déplacements, au travail ou en loisirs, de jour et de nuit, au pays ou à l’étranger.

Tout fait trace et alimente la machine. IN DATA WE TRUST telle est leur insigne. Note pour saisir la portée de ce graph qui fait signe, IN GOD WE TRUST est la devise qui figure sur les billets de dollars américains. La Data est devenu le nouveau Dieu comme la première source du Capital mondialisé. Mais aussi la matrice à investir pour y poser ses vers en ligne. Mise en pratique de la théorie de la déconstruction de Derrida et son noyau central sur lesquels nous reviendrons pour retourner la situation. Tout système a une faille et incorpore en son sein dès sa conception et sa mise en place, le mécanisme qui le fera basculer quand il sera à son faîte. Roue de la Création. Loi du contraste qui structure l’univers. L’homme et ses réalisations n’échappent pas à la règle.

Jadis cloués sur place, plombés par des mires en barres, les télé-spectres-acteurs d’aujourd’hui embarquent leur poste pucé dans leur poche. Mouchardés, ils sont surveillés dans leurs moindres faits et gestes, pistés, traqués, les données sont enregistrées, stockées, étudiées, analysées, remachées, recrachés. Qui n’a pas reçu de google le décompte de ses trajets  de l’année, du mois pour signifier que rien n’échappe à la Matrice ? Quelle chaîne ou site ne garde pas trace de tous nos zaps et toutes nos entrées et ne nous propose pas ses sujets personnalisés ? Pensées et mouvements. Idées et et actions. Manipulation à fond. La télévision de papa encageait. La télévision connectée, relayée et déployée sur la Toile, s’immisce dans l’intimité des vie pour capter attention et données, nous réduire à des noyaux larvaires à sucer. Pour nourrir qui, quoi ?

Qu’opposer au venin de ce dard mortel sinon des prises d’Ær ? Libre comme l’air, libre comme l’Art ? GO GO GO D’ART ! PASS FREE ART, ART PASS FREE. FREE ART PASS, Nous reparlerons de ces mots-ci en évoquant notamment GODARD et son Adieu au langage. Plus d’un changement de paradigme s’opèrent en ligne ON SCREEN. Le cinéma portait en lui tout cela. Ne fut-il pas Matrice sur écran dont nous sommes sortis ? Les écrans pansaient nos plaies, les screens les criblent, ramenant les images à des éclairs et les sons à des cris. Effilochage et éclatement de la pensée prise en otage. Noyautage et concaténation du Dire. Fin du langage discursif. Explosion de la mire et du langage pour finir. L’iA pour commencer quia pris son envol depuis quelques années et qui s’invite systématiquement désormais dans tous les services proposés, de l’écriture d’un mail aux services administratifs en société en passant par l’achat d’un bien ou la recherche d’un contenu sur le net. Bienvenue dans la Matrice !

La suite de cette réflexion se poursuivra en se plongeant dans la fabrique de l’information, pour mieux saisir cette faim de télévision qui nous entraine vers une fin de civilisation, et l’ouverture créée par toutes ces évolutions.

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